La justice comme équité, de Rawls
samedi 4 août 2007
En effet, arrivés avec seize ans de retard dans le débat sur l’oeuvre rawlesienne, devenue incontournable par son immense renommée dans l’univers anglo-saxon, nombre de commentateurs français y avaient vu une justification des inégalités de revenus au nom de l’efficacité économique. La Justice comme équité confirme que Rawls est un auteur certes « libéral », mais dans le sens américain du terme. C’est dire qu’il se situe plutôt à gauche sur l’échiquier politique, voire à l’extrême-gauche. De fait, l’Etat-providence n’est pas assez égalitariste à son goût : même quand il instaure des smic et autres revenus minimun d’insertion (RMI), « il autorise des inégalités très importantes en matière de propriété réelle, si bien que le contrôle de l’économie et de l’essentiel de la vie politique reste entre quelques mains ». Rawls va même jusqu’à dire que « l’Etat-providence permet à une classe réduite de détenir un quasi-monopole des moyens de production », tandis que se développe « une classe déshéritée et découragée dont les membres sont dépendants de manière chronique des prestations distribuées ».
Dans ce dernier ouvrage, Rawls expose à nouveau sa fameuse théorie de la justice tout en répondant aux critiques que lui ont adressées les esprits les plus fins de l’époque dans son domaine, notamment Hart et Dworkin, et en corrigeant ce qu’il appelle ses erreurs « les plus graves ». Bref, il court trois lièvres à la fois. Autant dire que la lecture de l’ouvrage est particulièrement difficile. Mais aussi particulièrement excitante pour qui cherche à répondre à l’une des plus vieilles questions que se pose l’humanité : qu’est-ce qui est juste ? Question d’une brûlante actualité dans les sociétés plurielles que vise Rawls, où les citoyens ne peuvent pas ou ne peuvent plus s’accorder sur une même autorité morale, un même texte sacré, une même tradition religieuse. Exemple : est-il juste ou injuste d’interdire le port du voile à l’école de la République française ?
Forum
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La justice comme équité, de Rawls8 août 2008, par Glouby
"Mais Rawls ne justifie pas cette affirmation, qui peut servir, et a servi, à légitimer des collectivisations de ressources naturelles et/ou de moyens de production - avec les résultats que l’on sait -, et que le philosophe américain connaissait."
Et vous justifiez encore moins les vôtres, quand vous sous-entendez des liens entre la collectivisation et les "résultats que l’on sait" (la formule ne laisse pas présager un jugement positif).
En bref, le lien que vous faites entre communisme et régimes dictatoriaux ne semble être justifié que par l’accumulation des préjugés issus de la guerre froide...